Cela étant, on ne saurait brandir ce principe de loyauté tous azimuts, comme une espèce de mantra destiné à conjurer la perspective d’avoir à rendre compte. Cette invocation pourrait aboutir à crisper les débats. Puisque le principe de loyauté probatoire n’existe pas vraiment en droit pénal, un cocontractant pourrait en effet favoriser cette voie afin de faire toutes ses offres de preuve. Plus fondamentalement, il existe d’ailleurs un droit à la preuve qui participe du droit à un procès équitable et qui peut contrebalancer le principe de loyauté. C’est dire que celui-ci n’est pas absolu et ne fait pas toujours obstacle à la production d’une preuve obtenue de manière prétendument déloyale.
Les tribunaux sont d’ailleurs plus pragmatiques qu’on le dit parfois. Ainsi notamment en droit de la concurrence. Dans un décision du 8 septembre 2016, le Tribunal de première instance de l’Union européenne a ainsi posé que « l’utilisation en tant que moyen de preuve d’un enregistrement illégal ne se heurte pas en soi aux principes d’équité consacrés par l’article 6§1 de la Convention européenne des droits de l’homme, y compris lorsque cet élément de preuve a été obtenu en violation des exigences de l’article 8 de la Convention, lorsque, d’une part, la partie requérante en cause n’a pas été privée d’un procès équitable ni de ses droits de la défense et, d’autre part, cet élément n’a pas constitué le seul moyen de preuve retenu pour motiver la condamnation ».
Il faut donc veiller à ne pas faire d’un principe de loyauté l’instrument d’une profonde déloyauté.