Rupture brutale des relations / Déséquilibre significatif

Si le changement est nécessaire, ce n’est pas une raison pour évincer ses partenaires commerciaux brutalement. Le législateur impose ainsi le respect d’un préavis. Quel délai respecter néanmoins? Ou quelle indemnisation réclamer ? Autant de questions qui appellent une réponse sur mesure. Forte de son expérience, notre équipe est prête à vous conseiller, à vous défendre.

Faire face à la rupture brutale d’une relation commerciale

C’est dans un souci d’équilibre que le législateur a, en 1996, entendu régir spécifiquement la rupture des relations au sein de la grande distribution alimentaire. Le texte a toutefois largement dépassé ce cadre et l’article L. 442-6 du Code de commerce est devenu le garant d’un certain équilibre dans de la rupture des relations commerciales.

Le but n’est pas d’assurer un droit à la stabilité. La rupture n’est pas interdite, elle est encadrée. La règle sanctionne simplement celui qui ne laisse pas à son partenaire le temps d’anticiper la fin de la relation et de se réorganiser.

Notion de relation commerciale établie

La relation prise en compte peut découler d’un contrat, mais aussi d’une succession de contrats, même ponctuels et relativement espacés dans le temps, dès lors qu’ils révèlent un lien régulier, significatif et stable.

Elle n’est pas nécessairement formalisée par écrit et ne lie même pas forcément depuis l’origine les mêmes personnes, lorsque les parties ont la volonté de s’inscrire dans la continuité d’une relation antérieure.

Notion de rupture brutale

Une approche économique et concrète s’impose :

  • peu importe que la rupture soit explicite ; elle peut résulter d’un appel d’offre soudain ou d’une modification des conditions contractuelles.
  • peu importe que la rupture soit totale ou partielle, notamment en cas de diminution importante et durable des commandes.

L’article L. 442-6 sanctionne la rupture brutale d’une relation commerciale établie qui intervient sans préavis écrit tenant compte de la durée de la relation.

La sanction porte sur l’insuffisance de la durée du préavis. Pour l’estimer, le juge se réfère à la durée de la relation commerciale et, selon les termes de la jurisprudence, aux autres circonstances de l’espèce : dépendance économique de la victime à l’égard de l’auteur de la rupture, cycle de commercialisation des produits concernés, investissements récents ou non. Il n’est pas lié par les clauses d’un contrat qui préciseraient la durée du préavis.

Seules la faute grave et la force majeure sont susceptibles de justifier une rupture sans préavis mais la rupture ne doit pas être prévisible.

Lorsqu’une rupture a lieu sans préavis écrit d’une durée suffisante, une indemnisation en rapport avec cette durée est due à la victime.

L’interdiction des déséquilibres significatifs

Les clauses ou obligations « créant un déséquilibre significatif entre les droits et obligations » de partenaires contractuels ou commerciaux, professionnels, sont désormais interdites, aussi bien par le Code Civil (article 1171), que par le Code de Commerce (article L.442-1-I-2°), au même titre que les clauses abusives dans les relations entre professionnels et consommateurs

L’objectif du Législateur

Ces dispositions sont récentes. Le Législateur a visé avant tout les obligations déséquilibrées imposées par la grande distribution à ses fournisseurs.

Toutefois, les deux textes ont une portée générale et la jurisprudence en fait notamment application aux clauses ou obligations que les concédants ou franchiseurs, peuvent imposer à leurs distributeurs.

Portée respective des dispositions

L’article 1171 du Code Civil prévoit la nullité des clauses écrites insérées dans des contrats d’adhésion (non négociés) et ne permet pas au Juge de contrôler un prix abusif.

L’article L.442-1-I-2°) du Code de Commerce s’applique à toute obligationà laquelle un partenaire commercial soumet un autre partenaire sans négociation possible. Il permet d’obtenir réparation du préjudice subi par l’entreprise victime de l’obligation déséquilibrée, y compris s’il s’agit d’un déséquilibre tarifaire.

Applications pratiques

De nombreuses clauses contractuelles ont déjà été jugées déséquilibrées (clauses pénales ; clauses autorisant une résiliation immédiate et sans manquement grave ; clause imposant des conditions de commande ou de livraison faisant peser sur l’un des partenaires tous les risques commerciaux).

La Cour de Cassation a précisé dans un arrêt du 25 Janvier 2017, que le Juge peut contrôler si les conditions tarifaires n’entrainent pas un déséquilibre significatif et vérifier si des systèmes de remise ne permettent pas à l’un des partenaires de retirer d’une opération commerciale un avantage disproportionné.

Dans des secteurs comme la distribution automobile notamment, où les remises de base ne permettent pas d’assurer l’équilibre d’exploitation des distributeurs, le contrôle des déséquilibres significatifs peut permettre de s’opposer à des systèmes de primes qui ne reposeraient pas sur des bases objectives (remises qualitatives notamment) ou priveraient sans justification des distributeurs de remises constituant la contrepartie de services rendus.